Nicolas Dubois Paris,
le 27 août 2015
Projet « Le Pari
Vélo »
Lauréat du Prix Paris Jeunes
Aventures
Catégorie défi sportif
(2014-2015)
Contact :
nicobici1987@gmail.com
Bilan du voyage et anecdotes
ABC du Pari Vélo
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A) Aventure
Le Pari Vélo, une véritable aventure à vélo de 10000
km. Il s’agissait de mon premier voyage à vélo de 6 mois et en solitaire. J’ai
souhaité aller à la rencontre des populations locales, découvrir différentes
cultures et également traverser des régions isolées.
J’ai découvert le Japon, le Vietnam, le Laos, le
Cambodge, la Malaisie, Singapour, la Turquie, la Grèce, la Bulgarie, la
Macédoine, l’Albanie, le Monténégro, la Croatie, l’Italie puis plusieurs
régions de France à vélo, de fin janvier à août 2015. J’ai également fait étape aux États-Unis et en Inde mais sans me déplacer quotidiennement à vélo. Voyager en Europe était sans doute plus
« accessible », plus aisé. Avec nos repères européens, on s’y adapte
très vite. On y trouve facilement où faire ses courses ; on trouve des
pharmacies, des cafés...
J’ai goûté à l’aventure lorsque j’ai traversé la zone
frontalière montagneuse située entre le Vietnam et le Laos (Cua khau Bo y /
Attapeu). Les sacoches étaient remplies de vivres pour trois jours. J’ai emprunté
une route sinueuse de montagne, en partie en travaux, sur laquelle je n’ai
croisé que les camionneurs transportant du bois du Laos au Vietnam. Certains faisaient
des pauses et discutaient, assis sous leurs camions, en jouant aux cartes. Il fallait
régulièrement pousser le vélo, dans la poussière et en pleine chaleur. J’y ai
croisé des chasseurs sortant de nulle part dans la jungle. J’ai eu la chance de
tomber sur une cabane construite au bord de la route pour y passer une nuit.
La navigation n’était pas toujours aisée. Dans
certains pays, les cartes disponibles n’étaient pas précises. Les panneaux de
signalisation étaient quasi inexistants ou bien dans un alphabet inconnu. Certaines
villes possèdent des noms différents selon la langue utilisée. Il fallait demander
sa route régulièrement et parfois proposer aux habitants de faire un schéma, pour
savoir dans quelle direction je devais continuer mon chemin. Dans les autres pays, j’utilisais les cartes
hors-ligne téléchargées sur mon smart phone.
Le défi physique était d’importance lorsque j’ai
décidé de rejoindre Siem Reap depuis Stung Treng dans le nord du Cambodge. Une
route récemment refaite, mais une chaleur pesante et très peu de points de
ravitaillement. Les terres étaient sèches et pauvres et les échoppes rares. J’ai
été hébergé par un couple qui m’a expliqué comment me laver à la source du
village (habillé d’un pagne). Puis, ils m’ont indiqué la charrette sur laquelle
je pourrai dormir (plus confortable car plus aéré).
B) Boire
Etre à court d’eau, un véritable danger. Tous les
jours, toutes les deux heures parfois, il fallait penser à remplir toutes les
bouteilles. J’essayais d’avoir toujours une bouteille d’avance (ne pas attendre
la dernière goutte avant de chercher un point d’eau !). Au Japon je ne consommais
que 2 ou 3 litres d’eau par jour, alors
qu’au nord du Cambodge j’avais besoin d’au moins 7 litres. J’ai fait le choix
d’acheter des bouteilles plutôt que d’utiliser mes pastilles pour purifier
l’eau. En Asie du sud-est : quand je n’étais pas certain de la provenance
de l’eau, j’optais pour une canette de soda jusqu’au village suivant (souvent
en vente au bord des routes dans des glacières). La bière semble être la
boisson nationale dans la plupart des pays traversés (Beer Lao, Cambodia
Beer). J’ai finalement jeté ma gourde percée en Grèce, que j’ai remplacée par
une bouteille plastique du même volume. L’eau était également nécessaire pour
laver les fruits et légumes, se laver les dents, se rafraîchir le visage, laver
ses vêtements … J’ai recommencé à utiliser l’eau du robinet en Turquie, en réutilisant
les mêmes bouteilles le plus longtemps possible.
C) Chaleur
La chaleur, mon ennemi numéro 1. J’ai dû organiser mes
journées en fonction de l’heure du lever du soleil. Les pays les plus
chauds : le Cambodge en avril (39° le jour où j’ai rejoint Preah Vihear), la
Malaisie en mai (moins chaud mais plus humide), l’Inde en juin (pas de vélo mais
une journée à 42°), l’Italie en juillet (38° à l’est de Florence). Pendant les
journées chaudes, je roulais de 7h à 11h, puis en fin d’après-midi avant le
coucher du soleil. J’ai acheté au Vietnam une sorte de chapeau d’apiculteur qui
couvre également le cou et les épaules. Fin juin, après trois mois de grosses chaleurs :
j’ai eu droit à ma première bouffée d’air frais en Bulgarie, où un temps gris
et pluvieux m’attendait.
J’ai également dû faire face au froid aux Etats-Unis,
puis au Japon : lorsque j’ai rejoint le lac Yamanaka (au pied du mont
Fuji, début mars), un panneau affichait 2° à 14h et il a neigé pendant la nuit.
Les jours qui ont suivi, j’ai longé le littoral où les températures ne
dépassaient pas les 10°.
D) Danger
Je ne me suis jamais senti en danger au cours de ce
voyage. J’ai simplement fait attention à mes effets personnels, surtout
dans les grandes villes. Pour camper, je parlais aux habitants du village pour
être sûr que le lieu choisi était le bon. Une seule nuit, en Malaisie, alors
que je campais aux abords d’un hôtel abandonné, j’ai aperçu au loin des
faisceaux lumineux provenant de la plage. Je ne comprenais pas d’où venaient
ces lumières et je me suis inquiété. J’ai réalisé une heure plus tard qu’il
s’agissait d’adolescents partis à la pêche aux crabes.
Le pire danger, c’est la route. Il fallait s’habituer
aux coutumes locales : rouler à gauche ou à droite de la chaussée, le fait
que le véhicule le plus « gros » ait la priorité, comprendre ce que
signifiaient les klaxons incessants (au Vietnam). La route la plus dangereuse a
sans doute été le gigantesque pont qui relie Johor Bahru (Malaisie) à
Singapour. La circulation à vélo dans Hanoi est également assez chaotique. Un
exemple de route très tranquille est la « Cycling Riviera », une piste
cyclable en site propre construite sur une ancienne voie ferrée (région de San
Remo et d'Imperia, Italie).
J’ai été victime (ou plutôt coupable) d’un seul
« mini accident », le dernier jour de mon voyage, dans une rue calme
d’Etampes. Je rêvassais, pensant sans doute à mon arrivée toute proche, et je
suis entré de plein fouet (à vitesse réduite) dans un pot de fleurs en béton,
m’étalant sur le goudron (sans gravité pour le vélo ou le cycliste).
E) Entretiens
pour le Pari Vélo
L’un des trois axes du projet « Le Pari
Vélo » était d’aller à la rencontre d’acteurs (ONG, associations, individus,
municipalités…) investis dans la promotion du vélo (sous toutes ses formes et pour
tous ses usages). J’avais pour objectif d’étudier les pratiques cyclistes
(culture et infrastructures) dans les différents pays traversés, par moi-même,
chaque jour, en circulant à vélo, mais également par le biais de ces
entretiens. J’ai eu la chance de rencontrer :
Etats-Unis (fin janvier/février 2015) : Bicycle Film
Festival (Brend Barbur, créateur du festival : www.bicyclefilmfestival.com) ;
Time’s Up (Simon, bénévole : times-up.org) ; Transportation Alternatives
(Ollie, employé : https://www.transalt.org)
Japon (février/mars) : Café galerie Khuns à Asakusabashi,
Tokyo (Junichi, gérant : http://www.kuhnsbar.com)
; Kaze Bicycle Messengers (Fujimura et Kenya, coursiers à vélo : https://www.facebook.com/messengerKAZE.osaka)
Vietnam/Laos/Cambodge (avril) : La Bicicleta, café culturel
à Hanoi (géré par Gium, également investi dans l’association The Hanoi Bicycle
Collective : https://www.facebook.com/THBC.VN)
Malaisie/Singapour (mai/juin) : Farred, activiste vélo (http://klcycleguy.blogspot.com) : il
est également investi dans l’élaboration de la Cycling KL Map : http://cyclingkl.blogspot.com ; Love
Cycling SG (Francis Chu, organisateur et bénévole : Love Cycling SG)
Turquie (fin juin) : Istanbul Bisiklet Festıvalı, le
festival international de vélo d'Istanbul (comité organisateur : http://bisikletliler.org) ; entretien avec
Murat, représentant de la Turquie au forum Vélocity 2015 à Nantes : http://www.velo-city2015.com
Grèce/Italie/France (juillet/août) : Municipalité de Thessalonique
(George Dimarelos, élu aux Transports et aux Mobilités : www.thessaloniki.gr/en) ; Réseau
cyclable Bicipolitana - Municipalité de Pesaro (Luca, employé au département de
l'environnement de la ville : www.pesaromobilita.it)
; Montélovélo, Montélimar (Gilbert, bénévole coordonnateur :
montelovelo.free.fr).
Pour consulter les rapports concernant ces entretiens, vous
pouvez parcourir le blog « Pari Vélo » : http://parivelo.blogspot.com
Un bon exemple d’initiative et d’infrastructures : les
immenses parkings vélo aux abords des stations de métro Tokyoïtes, qui permettent
aux habitants de combiner leurs trajets à vélo avec l’utilisation des
transports en commun. Les vélos « Mamachari » sont très utilisés non
seulement pour se déplacer mais également pour transporter les courses et les
enfants. Il est courant que les vélos circulent sur la moitié du trottoir côté
« chaussée », l’autre moitié étant bien sûr réservée aux piétons.
Un exemple à ne pas suivre : la ville de Kuala
Lumpur, qui croît à grande vitesse sans prendre en compte les besoins des
piétons et des cyclistes. Les aménagements ne sont pas à échelle humaine. Le
réseau secondaire est très peu développé et l’on doit emprunter de très grands
axes dangereux, conçus pour les véhicules motorisés.
F) Fujisan
Je n’oublierai pas ma première journée à vélo… Depuis le toit de la maison de mon ami Shin près de Mitaka à Tokyo, j’apercevais au loin le Mont Fuji. Je
suis parti au petit matin, avec un gros manteau, et j’ai parcouru les 90 km qui
me séparaient de Yamanakako, à 900 m d’altitude, m’approchant ainsi de Fujisan.
Le soir, alors que les températures étaient presque négatives, je trouve une
modeste Minshuku (petite auberge traditionnelle) qui semble déserte. J’ai
enfilé les petits chaussons que m’avait remis l’employé et je me suis rendu
pour la première fois dans un O-Furo (le bain), fumant et bouillonnant. Cette
première journée fut forte en émotions, belle et intense !
G) Générosité
J’ai eu la chance de rencontrer des personnes
profondément généreuses et bienveillantes dans tous les pays traversés. Des
inconnus m’ont proposé de m’héberger; on m’a offert des cafés en Turquie, on
m’a offert des glaces en Grèce et des fruits en Croatie ; j’ai été faire
réviser mon vélo à Singapour et en Grèce et le service ne m’a pas été facturé…
Quand on s’ouvre aux autres et qu’on arrive quelque part sans attentes
spécifiques, les rencontres sont authentiques. Les plus modestes comme les plus
aisés sont souvent prêts à partager ce qu’ils ont.
H) Hébergement
J’ai choisi de partir avec tout l’équipement
nécessaire pour être autonome. Mon matériel de camping tenait dans une sacoche.
J’ai pu camper dans des régions reculées et j’ai également dormi dans quelques
campings lorsque l’occasion se présentait. Je suis membre du réseau
Couchsurfing depuis 2008 et du réseau Warmshowers depuis 2013. Grâce à
l’existence de ces sites internet d’hébergement solidaire, j’ai pu faire des
rencontres enrichissantes. J’ai également été hébergé par des amis à Tokyo,
sur l’île de Shikoku, à Phnom Penh et à Lyon. Enfin, en cas de besoin, je
faisais étape dans une auberge (ex : sur Honshu au Japon à cause du froid,
ou au Laos à cause de la chaleur).
I) Internet
A l’ère d’internet, il est certainement plus facile de
voyager aujourd’hui que dans le passé. J’avais pour objectif de me
« déconnecter » le plus possible, néanmoins cet outil est réellement
pratique voire incontournable au cours d’un voyage (consultation de cartes en
ligne, météo, conseils de voyages, actualités dans les pays traversés,
communiquer avec ses proches…). Je trouvais régulièrement des accès au Wifi
(j’utilisais un smart phone) et je m’arrêtais une fois par semaine dans un
cybercafé pour publier un article sur mon blog.
J) Journée
type
Italie en juillet :
Lever 7h30 (je range ma tente et je dis au revoir aux fermiers qui m’avaient
prêté un bout de leur champ). Je redescends en vallée. A 8h30, je trouve un
café pour me restaurer, charger les batteries, remplir les bouteilles d’eau et
déchiffrer le journal local. J’évite les grands axes et j’atteins vers midi un
bourg plus important pour déjeuner. Je choisis une petite boulangerie/snack
pour m’asseoir à l’ombre. Une scène de spectacle en bois est en cours de montage
sur la place centrale : lieu idéal pour une sieste à l’ombre, à 13h15. Je
reprends la route vers 14h30. Il fait décidément trop chaud. Je m’arrête à
nouveau à 15h dans un village. J’opte logiquement pour une glace et j’écoute
mes voisins, en plein débat. Ouf, ça se couvre. Lors d’une journée nuageuse, je
peux parcourir une distance bien plus importante. J’atteins Pontassieve (non
loin de Florence) où je rencontre des jeunes. Je me présente et je leur demande
s’ils connaissent un endroit pour planter la tente. Ils m’invitent chez eux et
je me retrouve 5 km plus loin, au milieu des vignes, dans la vieille bâtisse où
ils vivent en colocation. Nous préparons une grande quantité de pâtes pour tous
les convives et nous passons la soirée à discuter dans un mélange d’anglais, d'italien, d’espagnol et de français.
K) Kilomètres
Je parcourais en moyenne 80 km par jour. Je faisais
une à deux « pauses » par semaine. J’en profitais pour me promener à
pied, visiter, nettoyer mon matériel et mes affaires et remplir les sacoches de
vivres. Les cyclistes le savent, le vent peut être votre meilleur ami comme votre
pire ennemi… Au Japon, il m’a fallu de longues heures pour venir à bout des 45 km
qui séparaient Toyohashi d’Irago-Misaki, avec un fort vent de face. En
revanche, j’ai effectué une étape d’environ 110 km au sud du Laos avec un vent
légèrement favorable (le long du Mékong). Sans relief, il est possible de
rouler plus de 100 km (exemple de Thessalonique à Edessa en Grèce). En
revanche, s’il faut franchir un col (de Komotini à Zlatograd ou de Grasse à
Castellane), mieux vaut ne rien prévoir et s’arrêter avant que le corps ne
flanche (50-60 km maximum). Le revêtement de la route est également
déterminant (ex : « routes » en terre d’Attapeu à
Champasak ; routes en travaux au Vietnam -graviers- ; ou au contraire
enrobé de bonne qualité au Japon).
L) La
chaîne de cadeaux
L’un des objectifs du Pari Vélo était de réaliser une
« chaîne de cadeaux ». J’avais l’intention de remettre un
« cadeau » à la première famille qui m’hébergerait, et proposer à ces
personnes de me confier un autre objet, qui ait un sens pour eux. L’objectif
était d’emporter ce nouvel objet sur mon vélo et de l’offrir lors de mon étape
suivante (puis de répéter cette opération autant de fois que possible). Je
souhaitais transporter des objets qui racontent une histoire
(des graines, le dessin d’un enfant, un morceau de tissu brodé…) et d’en être
le messager pendant une journée.
L’opération a principalement fonctionné spontanément,
sans expliquer mon projet ou le concept de cette chaîne de cadeaux
(barrière de la langue, entre autres). Les objets ou « cadeaux » que
l’on m’a remis ont tout de même donné lieu à des anecdotes intéressantes. Par
exemple, la famille japonaise qui m’hébergea spontanément m’a offert des
Shiitake de leur jardin (champignons), que j’ai cuisiné le lendemain avec mon
hôte espagnol, fin cuisinier vivant au Japon. Un exemple plus récent est le
miel « maison » qui m’a été offert par mes hôtes à Montélimar, que
j’ai ensuite offert à mes hôtes à Tournon-sur-Rhône, qui avaient pour projet de
créer un « Locavore » (vente de produits locaux). L’objet que j’ai le
plus offert : des gilets jaunes fluo, que j’ai reçu en quantité lors du
festival international du vélo à Istanbul (j’en ai même offert à des hôtes
grecs).
M) Merci !
Un grand merci à la mairie de Paris et au jury du
concours Paris Jeunes Aventures de m’avoir désigné lauréat du prix, catégorie
défi sportif. Un grand merci à Damien et Antoine pour m’avoir représenté lors
de l’annonce des résultats. Un grand merci à ma famille, mes amis, mes
collègues et tous ceux qui se reconnaîtront. Un grand merci à toutes les
familles qui m’ont hébergé spontanément, ou par le biais des réseaux
Couchsurfing et Warmshowers, et à celles qui ont participé à la « chaîne
de cadeaux ». Un grand merci aux associations qui ont accepté de me
rencontrer dans le cadre de mon étude sur la culture, les infrastructures et les
initiatives cyclistes dans leur ville. Un grand merci à toutes les personnes
rencontrées au cours du voyage pour leurs conseils avisés. Tout simplement
merci à ceux qui m’ont suivi, soutenu, aidé et accompagné de près ou de loin
dans la réalisation de ce projet.
N) Nourriture
Il faut s’adapter constamment ! On ne trouve pas
de tout partout. Se nourrir « local », c’est une très belle manière
de s’immiscer dans la culture d’un pays. J’ai fait le choix de ne pas apporter
de matériel de cuisine. Je pouvais ainsi quotidiennement « partager »
mes repas avec les habitants du coin, dans de petites échoppes au bord des
routes, sur les marchés... J’ai appris à faire « Slurp » comme les japonais,
j’ai pu ingurgiter des litres de Pho sur de minuscules tables en plastique installées
sur les trottoirs au Vietnam, commander de nombreux Nasi Lemak en Malaisie, boire
des Lassi (frais ?) en Inde, faire des réserves de graisses avec des
Baklawa au petit déjeuner en Turquie, prendre un déjeuner un semblant plus
léger avec une salade grecque, boire des bons cappuccino aux comptoirs en
Italie, et finalement goûter aux quenelles de Lyon chez mon amie Aurélie.
Il fallait également prévoir des réserves pour
pédaler. Je faisais en sorte de toujours avoir des fruits et des gâteaux dans
mes sacoches. Erreur commise à deux ou trois reprises : la tablette de
chocolat… qui fond à vitesse grand V !
O) Outils
/ mécanique
Incroyable : quasiment aucun souci mécanique avec
mon matériel (malgré 10000 km parcourus). J’avais emporté les outils essentiels
mais ils n’ont heureusement pas tous servis. J’avais pris quelques cours de
mécanique vélo avant le départ mais je n’ai pas eu l’occasion de faire mes
preuves ! Une seule crevaison (grâce à d’excellents pneus), en Croatie. Un
clou s’est planté droit dans ma roue en Grèce mais la bande anti-crevaison a
été la plus forte. J'ai également eu un rayon cassé et une sacoche
qui s'est décrochée. Je tiens à remercier les mécaniciens vélo de Singapour et de
Kalamaria (Grèce) qui m’ont offert la révision de mon vélo. Une clé plate s’est
cassée alors que je remontais mes pédales à l’aéroport d’Istanbul. Le
lendemain, j'ai cherché à remplacer cette clé et le vendeur m'a tendu un outil d’un
mètre de long ! J’ai bien ri et nous avons ensuite trouvé la bonne
solution.
P) Portraits
Le troisième objectif du Pari Vélo était de réaliser des
portraits d’habitants dans chaque pays. J’ai réalisé quelques portraits, après
avoir obtenu l’accord de la personne concernée (chauffeur de taxi en Inde,
éleveur en Bulgarie, petite fille japonaise jetée dans les airs par son père…).
J’ai eu plus de mal que je ne l’aurais pensé à aller vers les gens pour leur
demander de réaliser leur portrait, de peur de les déranger, de peur de
« détruire » l’instant authentique que j’étais en train de vivre et
enfin pour ne pas m’immiscer dans leur vie privée. Pour ma future exposition
photo, j’ai sélectionné des clichés variés : on y trouvera des scènes de
vie spontanée, avec plusieurs sujets. J’ai également choisi d’y faire figurer des
paysages des territoires traversés, et enfin des photos témoignant de la
culture vélo dans les différents pays.
Q) Quatrième
art
La musique est un art, une manière de s’exprimer, mais
également un langage universel, présent dans toutes les cultures. Dès mon
arrivée à New York, au tout début du voyage, j’ai été séduit par les improvisations
jazz de Marjorie Elliott à Harlem (elle reçoit le public dans son appartement).
Au Japon, je me suis rendu dans de nombreux temples où j’écoutais discrètement
prier les moines et les pèlerins. Au Laos, je me suis retrouvé dans des
fêtes de village animées, lors du Bum Pi Mai (nouvel an local). A Phnom Penh au
Cambodge, j’ai assisté à un petit concert de rue avec des instruments
semblables à des xylophones. En Malaisie, j’ai dansé au bord du détroit de
Malacca avec un groupe d’anciens camarades de classe qui se retrouvaient pour
la première fois depuis dix ans. A Singapour, j’ai été invité à dîner chez
Marc, dont la fille est une jeune violoniste prodige. J’ai eu droit à deux
morceaux. En Inde, je me suis retrouvé sur le toit d’une auberge avec des
voyageurs coréens et des footballeurs professionnels ivoiriens qui avaient
récemment fui le Népal suite au tremblement de terre : ils nous ont
enseigné des chants de leur pays. En Grèce, j’ai été hébergé par un rappeur
Gréco-russe qui m’a fait une démonstration dans son studio d’enregistrement.
Enfin, en Italie, j’étais présent lors de l’anniversaire de Paolo. Les invités
tapaient dans leurs mains et entonnaient : « Tanti auguri a
te ! ».
R) Rencontres
Un exemple de rencontre spontanée : une longue
étape dans le nord du Cambodge sous une grosse chaleur. Je demande à des
habitants si je peux planter ma tente sur leur terrain. C’est non. 10 km plus
loin, toujours rien, quand soudain (en anglais) : « Hello !
Come here ! ». Il s’agit d’Ou Samkouy, policier à Siem Reap et grand amateur de Badminton, installé
dans cette zone rurale à 40 km de la ville, qui m’invite à le rejoindre. Nous
discutons et Ou traduit notre conversation pour ses amis. Il me parle de ses
terres, des environs. Tiens ! Un vendeur de poissons à moto qui arrive du
lac Tonlé Sap. La sœur d’Ou les prépare au barbecue. Ou est en train de
construire une station service sur son terrain, pour avoir une activité
complémentaire à son travail de policier. Malheureusement, l’orage de la veille
a fait bouger les remblais et les fondations toutes neuves. Peu importe, Ou était plein d’énergie positive et semblait ravi de m’accueillir !
Rencontre prévue : depuis le Monténégro, j’avais
contacté Marko (membre de Warmshowers), septuagénaire vivant au sud de la
Croatie. Ce personnage haut en couleur a 1000 histoires à raconter à ses hôtes.
Il a fui son pays à 17 ans sur un bateau volé avec des amis. Il a rejoint
l’Italie, puis la France, puis à émigré au Canada où il a vécu et bien gagné sa
vie pendant 40 ans. A la retraite, il n’a plus un sou et il est rentré au pays
(la Yougoslavie est devenue la Croatie). Il vit dans des containers aménagés et
des caravanes améliorées, en pleine nature, à quelques kilomètres de Plocice.
La douche, c’est le tuyau servant à arroser les fleurs. Malgré son âge, il a
plusieurs projets à son actif. Il essaie de développer une sorte de réserve
écologique et de faire réhabiliter une vieille ligne de chemin de fer pour
attirer les touristes dans sa région. Il se dit fervent communiste et il parle
anglais comme un adolescent américain. Il m’a parlé de son expérience à Woodstock
et il dit avoir rencontré Fidel Castro en personne. Drôle de rencontre !
Rencontre de cyclo-touristes : à Malacca en
Malaisie, je rencontre une famille française qui voyage depuis un an et demi.
N’ayant jamais quitté la France auparavant, Natalie et Jean-Marie sont partis à
la découverte du monde avec leurs enfants Zoe (10 ans) et Yan (8 ans) à vélo,
direction l’Afrique (1 an), puis l’Inde (6 mois), puis l’Asie du sud-est (6
mois). Ils utilisent un tandem Pino (une personne allongée à l’avant et une
personne en position vélo à l’arrière) et deux autres vélos. Je les retrouve
trois jours plus tard au bord du lac Chini et nous campons sur la jetée, avec
deux de leurs amis franco-belges qu’ils avaient connus quelques mois plus tôt
en Inde. Une superbe famille d’aventuriers et de citoyens du monde (http://parentheseavelo.blogspot.com).
S) Santé
Je n’ai eu aucun problème de santé particulier. J’avais
pris une bonne assurance (avec rapatriement possible) en cas de besoin.
Quelques bobos minimes mais j’avais un kit de pharmacie amplement suffisant.
Les ennuis : bien se protéger des moustiques dans certaines zones, et se
méfier du soleil, presque partout ! Il faut faire bien attention à l’eau
et aux aliments non cuits. En Inde, des vendeurs reconditionnent de l’eau
achetée en grande quantité dans de petites bouteilles plastiques, semblables
aux bouteilles d’eau industrielles. Difficile cependant d’éviter tous les
microbes, d’où l’importance de partir avec une trousse à pharmacie complète.
Santé physique et mentale. Bonne condition tout au
long du voyage. Je suis parti « trop vite » en voulant faire trop de
kilomètres les deux premières semaines au Japon (mal aux genoux). J’ai ralenti
et je suis reparti sur un rythme plus raisonnable, rien ne sert de
courir ! Baisse d’énergie à la frontière du Monténégro et de la Croatie.
Heureusement, les trois jours de pause à Split et à Ancône m’ont permis de
récupérer. Il faut connaitre son corps, ses limites et ne pas les dépasser, car
le lendemain il faut sans doute pédaler à nouveau. Les journées au cours
desquelles je me suis particulièrement bien senti : de Bai Tam Tan An à Khâm
Đức au Vietnam (paisible, rural), sur l’île de Shodoshima au Japon, la descente
de Paso di Bracco à Sestri Levante en Italie (beaux virages en descente au
petit matin), les gorges du Verdon… Santé mentale : il faut être fort car
la route est parfois monotone, voire interminable. Néanmoins, il y a souvent
beaucoup de choses à observer et à faire sur la route. On croise des regards,
on s’arrête prendre une photo. S’il n’y a rien, on se concentre sur l’effort
physique ou bien on se perd dans ses pensées. On s’habitue à tout. Pendant les
pauses, puis en fin d’après-midi : c’est le moment de chercher où dormir
et le temps des rencontres.
T) Temps
Comme expliqué ci-dessus, les heures passées sur le
vélo peuvent être longues, et la journée peut sembler ne jamais finir (jusqu’à
l’arrivée à la destination du soir). Heureusement, c’est l’exception.
Généralement, je regarde tout autour de moi et je ne vois pas le temps passer.
Je m’arrête quand j’ai faim, quand quelque chose m’interpelle, quand je veux
garder un souvenir photo. Les heures et les kilomètres s’enchainent et le
mouvement devient la norme. Paradoxalement, sur une route plus difficile (avec
du relief, sinueuse), le temps passe plus vite. Sur une longue ligne droite
(ex : frontière turco-grecque côté Grèce ; une partie de la côte est
en Malaisie), le temps semble élastique, comme la guimauve.
Un voyage de 7 mois, c’est long ? Oui et non. Les
pays que j’ai choisi de découvrir à vélo sont assez petits. J’ai donc pu
découvrir une région littorale, une région rurale, puis traverser une petite
chaîne de montagnes, en quelques semaines, afin d’atteindre assez rapidement un
nouveau pays. Je pense que l’expérience doit être différente pour les voyageurs
à vélo qui choisissent de traverser la Chine ou la Russie. J’ai rencontré un
canadien, Keith, parti de chez lui avec son vélo il y a 7 ans. Keith est devenu
nomade. Le temps des nomades n’est pas le même que le temps des sédentaires.
J’ai appris à en profiter différemment. Il y a des moments où il faut un
planning serré pour profiter de toutes les opportunités qui s’offrent à nous,
puis il y a des moments où il est préférable d’aller doucement, de vivre
pleinement les choses, de s’adapter à un rythme qui n’est pas forcément le
nôtre (François).
U) Unesco
Lors de ce voyage, j’ai eu la chance de visiter de
nombreux sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO (http://whc.unesco.org/fr):
- Japon : Fujisan, lieu sacré et source
d'inspiration artistique (2013)
Sites
sacrés et chemins de pèlerinage dans les monts Kii (Le Mont Koya - 2004)
- Vietnam : Ensemble
de monuments de Huê (1993)
Vieille ville de Hoi An (1999)
- Cambodge : Angkor (Siem Reap - 1992)
- Malaisie : Melaka, ville historique du détroit
de Malacca (2008)
- Singapour : Jardin botanique de Singapour
(2015)
- Inde : Fatehpur Sikri (1986)
Le Taj Mahal (1983)
Ensemble du Fort Rouge (2007)
- Turquie : Zones historiques d'Istanbul
(1985)
- Macédoine : Patrimoine naturel et culturel de la
région d’Ohrid (1980)
- Monténégro : Contrée naturelle et culturo-historique
de Kotor
- Croatie : Vieille ville de Dubrovnik
- Italie : Centre
historique de Florence
- France : Site historique de Lyon
V) Voyage
Depuis plusieurs années, j’ai beaucoup appris grâce au
voyage. Le voyage est une source infinie de renouveau, pour s’épanouir,
s’enrichir, se découvrir. On y gagne et on y perd. Voyageons.
« Quand
tu aimes il faut partir
Ne larmoie
pas en souriant
Ne te niche
pas entre deux seins
Respire,
marche, pars, va-t’en »
B. Cendrars, Feuilles de route, 1924.
W) Wagons
Je me rappellerai de cet instant dans un train en
Inde. Deux femmes indiennes vêtues de saris colorés se tiennent à mes côtés et
discutent dans un dialecte inconnu. En face, un jeune homme regarde par la
fenêtre, l’air rêveur. Il est assis et a posé sa tête sur son genou afin
d’observer le paysage. Le train avance doucement. On entend le bruit des rails
et des ventilateurs qui tournent à pleine vitesse. Au dessus de moi, je
remarque les jambes des passagers du lit superposé qui se balancent, en suivant
le mouvement imposé par le wagon.
X) Xénophobie?
Je n’ai été témoin d’aucune scène de xénophobie ou de
racisme au cours de ce voyage. Dans plusieurs pays, j’ai bien remarqué la
coexistence de populations de différentes origines ethniques, mais je n’ai pas
remarqué de tensions particulières. Par exemple, j’ai pu observer l’existence
des différentes castes en Inde, j’ai remarqué en Malaisie que certains villages
étaient majoritairement Sino-Malaisiens alors que dans d’autres villages, la
population d’origine indienne était plus importante. En Malaisie, les différentes
populations (qui sont arrivées depuis plusieurs générations) tendent à vivre
côte à côte et à se regrouper par origine ethnique (langue différente parlée au
domicile et au sein de leur communauté).
Y) Y
a-t-il des questions?
Si oui, je serai ravi d’y répondre. N’hésitez pas à me
contacter à l’adresse email suivante :
Vous pouvez également me contacter via le blog http://parivelo.blogspot.com et la
page https://www.facebook.com/parivelo
.
Z) Zlatograd
Sans doute le seul « Z » du voyage.
Zlatograd en Bulgarie : un monde à part et mystérieux. Alors que je
brûlais sous le soleil grec, j’ai franchi les montagnes et je me suis retrouvé
sous la pluie en Bulgarie. Une toute autre atmosphère. Comme un bond dans le
passé, j’ai découvert de très belles demeures (qui me font penser à la Suisse)
mais également d’anciens bâtiments construits sous l’ère soviétique. Mon hôte
Anton, bon-vivant, sympathique et généreux m’a fait goûter en une soirée la
quasi-totalité des spécialités de sa région. Manque de chance, il restait un
plat que j’ai dû déguster le lendemain matin avant mon départ. Il s’agissait
d’une soupe de tripes. Rien de tel pour pédaler vite (vers la ville
suivante ?). Le voyage nous réserve toujours des surprises.
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